Foi et raison

Pourquoi la foi est-elle si importante ? La Bible dit en Hébreux 11.6 : « Sans la foi il est impossible de lui être agréable ; car il faut que celui qui s’approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu’il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent. » Si nous n’avons donc pas la foi, nous ne pouvons jamais plaire à Dieu.

Mais que veut dire au juste le mot « foi » ? Tous n’ont pas la même idée quand ils parlent de la foi. Ce qui nous intéresse le plus, c’est de savoir ce que la Parole de Dieu entend quand elle dit que nous devons avoir « la foi », ou que nous devons « croire ».

Reconnaissons premièrement que la foi comporte deux aspects qui se complètent. L’accent est parfois mis sur un aspect ou sur l’autre, mais tous les deux sont nécessaires. Dans un sens, croire, c’est reconnaître ou être convaincu de la vérité d’une idée ; c’est croire que telle chose est vraie. Il s’agit du côté plus intellectuel de la foi. On sait, on connaît certaines choses par la foi. Le deuxième aspect devrait être une conséquence du premier. Si l’on est vraiment convaincu en ce qui concerne Dieu et sa parole, cela produira une sorte de confiance, qui s’exprime à son tour dans les actions. L’Épître de Jacques chapitre 2 parle donc d’une foi qui, n’étant pas accompagnée d’œuvres concrètes, est morte en elle-même. Une foi intellectuelle qui n’est pas complétée par la confiance et l’obéissance reste sans valeur.

Le premier aspect : la conviction

Nous venons de dire qu’on connaît certaines choses « par la foi ». On tient ces choses pour vraies ; on les croit. Or, dans la langue courante, le mot « croire » suggère parfois la présence d’un doute. Une définition du dictionnaire est « tenir quelque chose pour possible, probable ; penser ». Nous disons par exemple : « Je crois qu’il viendra », ou : « Je crois qu’il va pleuvoir demain. » Cela ne veut pas dire que l’on soit très sûr de ce que l’on dit. En fait, selon la manière d’insister sur le mot « croire », l’idée de doute peut peser plus que l’idée de conviction. On pourrait dire, par exemple : « Je le crois, mais je ne suis pas sûr. » Dans la Bible, cela n’est jamais le cas. Selon Hébreux 11.1 : « La foi est une ferme assurance des choses qu’on espère, une démonstration de celles qu’on ne voit pas. » La traduction du Français courant est encore plus claire : « Avoir la foi, c’est être sûr de ce que l’on espère, c’est être convaincu de la réalité de ce qu’on ne voit pas. » Bibliquement parlant donc, dire que l’on croit telle chose, c’est prétendre savoir. Ce n’est pas suggérer l’incertitude.

Mais soulignons un autre fait concernant la foi, un fait que nous relevons de ce même verset en Hébreux : la foi se rapporte à quelque chose qu’on ne voit pas. Lisez encore Hébreux 11.1 : « Avoir la foi, c’est être sûr de ce que l’on espère, c’est être convaincu de la réalité de ce que l’on ne voit pas. » Les propos de l’apôtre Paul en 2 Corinthiens 5.7 enseignent le même principe : « Nous marchons par la foi et non par la vue. » Il y a, en effet, deux moyens différents de connaître quelque chose : par la foi ou par la vue. Soit nous tenons quelque chose pour vrai, parce que nous avons accepté un témoignage à cause de notre confiance à la source de ce témoignage (c’est-à-dire par la foi), soit nous tenons la chose pour vraie à cause de ce que nous avons vu personnellement de nos propres yeux. La plupart de ce que nous connaissons dans la vie, nous le connaissons par la foi. Nous avons accepté ce que d’autres personnes ont dit ou écrit parce que nous avons conclu que ces personnes sont dignes de notre confiance. Par exemple, je crois que le Japon est un pays réel, qu’il existe. Je ne l’ai pas visité. Je ne l’ai jamais vu de mes yeux. Mais j’accepte les témoignages de beaucoup de personnes qui prétendent être venues de ce pays ou qui prétendent l’avoir visité. Je n’ai absolument aucun doute concernant la réalité du Japon. Si vous me demandez comment je sais que le Japon existe, je dirai simplement que j’ai parlé avec des Japonais, j’ai lu des livres et des articles qui en parlent, j’ai regardé des reportages à la télévision, etc. J’ai confiance à ces sources de renseignements. Mais supposons qu’un jour j’aie l’occasion de monter dans un avion en partance pour Tokyo et que je passe un certain temps à découvrir le pays et sa culture. Par la suite, rentré chez moi, quelqu’un me demande comment je sais que le Japon existe. Je ne citerais plus les livres ou les reportages à la télé ; je dirais simplement que je sais que le Japon existe parce que je l’ai vu de mes propres yeux. Ce ne serait plus par la foi, mais par la vue. Ce n’est pas que ma connaissance serait plus certaine qu’avant ; mais elle n’aurait plus besoin de se baser sur les témoignages des autres.

Comment savez-vous que les micro-organismes existent et qu’ils peuvent vous rendre malades ? Comment savez-vous que les ondes radio existent et qu’elles sont le moyen par lequel vous entendez la musique de votre poste ? Comment savez-vous que Napoléon a vécu ou que la Révolution française a eu lieu ? Vous ne voyez aucune de ces choses de vos propres yeux. Vous les connaissez par la foi. Dans un sens réel, vous connaissez ces choses de la même manière que vous pouvez connaître que Jésus-Christ a vécu, qu’il a fait des miracles, qu’il a été crucifié au temps de l’Empire romain et qu’il est ressuscité d’entre les morts. C’est-à-dire, vous acceptez les témoignages de sources qui sont dignes de confiance. Ce n’est pas pour rien que la Bible nous dit en Romains 10.17 : « La foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole de Christ. »

Le deuxième aspect : la confiance

Mais voyons le deuxième aspect de la foi, à savoir, la confiance. La foi n’est pas simplement le fait de reconnaître intellectuellement telle chose pour vraie : c’est aussi le fait d’agir selon cette conviction. La foi, c’est compter sur quelqu’un ou quelque chose, sans crainte ni inquiétude ; c’est avoir confiance que l’objet de notre foi fera ce que nous en attendons.

Cet aspect de la foi est démontré dans la vie d’Abraham, que la Bible appelle « le père des croyants ». En Hébreux 11.8 nous lisons : « Par la foi, Abraham obéit quand Dieu l’appela : il partit pour un pays que Dieu allait lui donner en possession. Il quitta son propre pays sans savoir où il allait. » L’auteur poursuit aux versets 17-19 : « Par la foi, Abraham offrit Isaac en sacrifice lorsque Dieu le mit à l’épreuve. C’est à lui, Abraham, que Dieu avait fait la promesse, et pourtant il se montra prêt à offrir son fils unique en sacrifice. Dieu lui avait dit : « C’est par Isaac que tu auras les descendants que je t’ai promis. » Abraham estima que Dieu avait le pouvoir de ramener Isaac de la mort à la vie ; et Abraham reçut de nouveau Isaac qui lui fut, pour ainsi dire, ramené d’entre les morts. » Beaucoup de personnes prétendent croire en Dieu ; peu de gens mettent leur confiance en lui comme Abraham le faisait. La foi dans le sens de la confiance en Dieu permet de garder son calme face aux tempêtes de la vie et aussi d’obéir aux commandements de Dieu même quand il nous exige ce qui est difficile.

Pour revenir au verset par lequel nous avons commencé : « Celui qui s’approche de Dieu doit croire que Dieu existe (la conviction) et qu’il récompense ceux qui le cherchent (la confiance) » (Hébreux 11.6).

La nature de la foi

Quand on parle de la foi aujourd’hui, beaucoup de personnes expriment l’idée que leur foi religieuse est quelque chose de personnelle. Certainement, on ne doit pas recevoir la foi de ses parents sans l’examiner pour savoir qu’elle est vraie. Ce n’est pas quelque chose que le gouvernement doit décider pour nous. On ne doit pas épouser une croyance simplement parce que la majorité de nos voisins l’ont acceptée. C’est une décision personnelle.

La foi est objective

Cela ne veut pas dire que la foi est subjective. Il ne s’agit pas d’un choix arbitraire que je prends de croire telle chose parce qu’il me plaît de le croire. Vous êtes libre de croire ce que vous voulez, comme je suis libre, aussi. Vous ne chercherez pas à me force à accepter ce que vous croyez, et je me garderai de faire la même chose à votre égard. Mais cela ne veut pas dire que vous devez considérer ma foi comme étant aussi valable ou bien fondée que la vôtre. Je ne suis pas obligé de parler comme si ce que vous croyez est normal, quand en fait je trouve que votre croyance est fausse. Dire que nous avons la liberté de culte, dire que la foi est personnelle, en effet, n’est pas dire que la foi est subjective.

Certaines choses sont objectivement vraies ou fausses. Par exemple, deux et deux font quatre, quelle que soit mon opinion ou ma préférence. Paris est la capitale de la France, que je le reconnaisse ou pas. Ce sont des vérités objectives. C’est dans la catégorie de croyances subjectives, par contre, qu’on va classer les questions de goût, de culture ou de personnes. On ne ressent pas le besoin de pouvoir défendre rationnellement une position subjective. Si je dis que la glace au chocolat est meilleure que la glace à la vanille, je ne vais probablement pas offrir des arguments ou des preuves pour vous convaincre, et cela ne m’inquiète nullement si vous optez pour la vanille.

Malheureusement, quand certaines personnes disent que leur foi chrétienne est personnelle, elles entendent aussi par là que la foi religieuse est toujours subjective. Elle est vraie pour un homme parce qu’il l’a choisie ; ce n’est pas que cet homme a choisi sa foi parce qu’elle était vraie. Elle peut ne pas être vraie pour quelqu’un d’autre.

Jésus et ses apôtres n’ont jamais traité le message qu’ils prêchaient comme une idée à accepter si les auditeurs avaient envie de l’accepter ou à rejeter si elle ne leur convenait pas. Ils prétendaient que ce message était objectivement vrai et qu’il serait appliqué à tout être humain au dernier jugement. Jésus dit, par exemple, en Jean 12.48 : « Celui qui me rejette et qui ne reçoit pas ma parole a son juge ; la parole que j’ai annoncée, c’est elle qui le jugera au dernier jour. » L’Évangile, l’objet de notre foi, est objectivement vrai, et il s’applique à tous les hommes.

La foi biblique est rationnelle

Une autre fausse conception au sujet de la foi, c’est qu’elle est irrationnelle. Des théologiens et philosophes du 19e et du 20e siècles, tels que Kierkegaard et Camus, ont présenté la décision de croire comme « le saut de la foi », ou encore pire, « le saut dans l’irrationnel ». Puisque, selon eux, Dieu est indémontrable, l’homme doit nier sa propre raison, sa conscience lucide, afin de croire. C’est un saut dans l’obscurité, dans l’inconnu et l’inconnaissable. On s’engage sans aucune base rationnelle, n’ayant aucun moyen de savoir que Dieu existe.

Cette façon de voir l’action de croire rappelle une scène dans le livre Alice au travers le miroir, par Lewis Carroll. La Reine Blanche dit à Alice :

« J’ai exactement cent un ans, cinq mois, et un jour.

– Je ne peux pas croire cela ! S’exclama Alice.

– Vraiment ? dit la Reine d’un ton de pitié. Essaie de nouveau : respire profondément et ferme les yeux.

Alice se mit à rire.

– Inutile d’essayer, répondit-elle : on ne peut pas croire des choses impossibles.

– Je suppose que tu manques d’entraînement, dit la Reine. Quand j’avais ton âge, je m’exerçais à cela une demi-heure par jour. Il m’est arrivé quelquefois de croire jusqu’à six choses impossibles avant le petit déjeuner. »

La foi biblique est défendable

Contrairement à de telles conceptions de la foi, les auteurs de la Bible ne demandent jamais aux hommes de mettre de côté la nature rationnelle dont Dieu nous a dotés. Lui qui nous a donné l’intelligence ne nous invite pas à laisser notre cerveau à la maison quand nous venons à l’Église. Au contraire, lorsque Jésus citait le plus grand de tous les commandements, il dit : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta pensée » (Matthieu 22.37). Tout en reconnaissant qu’il y a parfois des faiblesses dans les manières humaines de raisonner et que la sagesse de Dieu est infiniment supérieure à celle des hommes, les auteurs inspirés ne demandent point à l’homme de rejeter l’aspect rationnel de son être. L’apôtre Paul dit, par exemple, en 1 Corinthiens 10.15 : « Je vous parle là comme à des gens raisonnables, j’en appelle donc à votre intelligence : jugez vous-mêmes de ce que je vais dire » (Parole vivante).

C’est justement parce que Dieu a fourni à la raison humaine des preuves suffisantes de son existence, de la vérité de sa parole et de la divinité de Jésus-Christ, qu’il les tient pour inexcusables quand ils refusent de croire. La Bible nous dit : « En effet, Dieu manifeste sa colère depuis le ciel sur tout péché et tout mal commis par les hommes qui, par leurs mauvaises actions, empêchent la vérité d’agir. Dieu les punit car ce que l’on peut connaître de Dieu est clair pour eux : Dieu lui-même le leur a montré clairement. En effet, depuis que Dieu a créé le monde, ses qualités invisibles, c’est-à-dire sa puissance éternelle et sa nature divine, se voient dans les œuvres qu’il a faites. C’est là que les hommes peuvent les connaître, de sorte qu’ils sont sans excuse » (Romains 1.18-20, FC). Quand nous considérons la complexité et les merveilles de ce monde, à tous les niveaux, complexité et splendeur que la science moderne ne fait qu’exposer en plus grand détail, nous ne pouvons jamais attribuer tout cela au simple hasard. Le chaos pourrait provenir d’une situation où aucune intelligence ne dirige les événements, mais il a fallu une intelligence divine pour créer un monde tel que nous habitons. C’est justement notre nature rationnelle qui se rebelle correctement contre la conclusion que nous sommes le produit du hasard et d’une série de plusieurs millions d’« accidents heureux ». En réalité, ce n’est pas le croyant, mais l’athée qui fait un saut dans l’irrationnel.

Ce n’est pas seulement à l’égard de son existence que Dieu fournit des preuves qui parlent à notre intelligence. La vérité de l’évangile est soutenue par des preuves historiques qui sont incontournables. C’est ainsi que l’apôtre Paul déclare aux hommes d’Athènes en Actes 17.30,31 : « Dieu ne tient plus compte des temps où les hommes étaient ignorants, mais il appelle maintenant tous les hommes, en tous lieux, à changer de comportement. Il a en effet fixé un jour où il jugera le monde entier avec justice par un homme qu’il a désigné. Il en a donné la preuve à tous en ramenant cet homme de la mort à la vie ! » (FC).

Malgré la conception de certains croyants, la foi biblique n’est ni subjective ni « un saut dans l’irrationnel ». On ne décide pas de croire parce qu’on a envie de le faire, mais sans avoir des raisons intellectuellement convaincantes. Les premiers chrétiens ne disaient pas aux autres de croire parce que cela leur ferait du bien sur le plan émotionnel ; ils ne demandaient pas aux autres de s’engager pour le Christ malgré un manque d’arguments raisonnables. Au contraire, l’apôtre Pierre dit aux chrétiens : « Si l’on vous demande de justifier votre espérance, soyez toujours prêts à la défendre, avec humilité et respect » (1 Pierre 3.15, Version Semeur). Le mot « défendre » dans ce texte ne se réfère pas aux armes militaires, mais aux arguments intelligents et intelligibles, capables de convaincre quelqu’un du bien-fondé de sa croyance.

Pourquoi tant de personnes ne croient-elles pas ?

S’il existe tant de preuves en faveur du christianisme, pourquoi tant de personnes, y compris des personnes intelligentes et bien instruites, ne croient ni à la Bible, ni en Jésus, ni même à l’existence de Dieu ? La réponse est que l’homme est doté non seulement de l’intelligence, mais aussi du libre arbitre, de la faculté de choisir. Nous ne sommes pas des robots ; chacun a une volonté. Les preuves qui s’étalent devant nous ne nous obligent pas à faire le choix le plus raisonnable.

Dans l’Évangile de Jean, Jésus parlait avec des Juifs concernant les prophéties incontournables qui avaient été faites à son égard des siècles avant sa naissance. Il leur dit : « Vous sondez les Écritures, parce que vous pensez avoir en elles la vie éternelle : ce sont elles qui rendent témoignage de moi. Et vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie » (Jean 5.39,40). L’obstacle à leur foi n’était pas un manque de preuves ; l’obstacle était au niveau de leur volonté. On voit la même logique dans les propos de l’apôtre Paul concernant les païens : « Ils connaissent Dieu, mais ils ne l’honorent pas et ne le remercient pas comme il convient de le faire pour Dieu… Ils échangent la vérité concernant Dieu contre le mensonge… Comme ils ont refusé de reconnaître Dieu, Dieu les a livrés à leur intelligence déréglée, pour qu’ils fassent ce qu’ils ne devraient pas faire » (Romains 1.21,25,28).

Croire de tout son cœur

Dans la pensée juive, le cœur n’était pas le siège de l’émotion, comme c’est le cas dans notre langage aujourd’hui. Pour l’émotion on parlait des entrailles. Colossiens 3.12, par exemple, nous demande de nous « revêtir d’entrailles de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience ». Le cœur, parmi les Juifs, était considéré plutôt comme le siège de la volonté. Ce n’est pas là où l’on ressent, c’est là où l’on décide (1 Cor. 7.37), c’est là où sont cachés ses desseins (1 Cor. 4.5). On obéit du cœur (Rom. 6.17). Quand on se révolte, c’est qu’on s’est endurci le cœur (Héb. 3.8). Et c’est du cœur que l’on croit (Actes 10.10; Actes 8.37), parce que croire, c’est une décision, c’est un acte de la volonté. Placé devant les preuves en faveur de Dieu et de sa parole, on doit toujours prendre une décision de les reconnaître ou de les nier.

Voilà pourquoi le Seigneur n’est pas injuste quand il dit en Marc 16.16 : « Celui qui ne croira pas sera condamné. » Certaines personnes raisonnent ainsi : « Qu’y a-t-il de moral ou d’immoral à croire une série de déclarations ? On accepte ou rejette une affirmation parce que l’évidence paraît bonne ou mauvaise. Si un homme se trompe, cela ne signifie pas que c’est un homme mauvais ; il ne serait seulement pas très intelligent. » Mais ce raisonnement n’est pas très réaliste. Trop souvent, les hommes croient ou refusent de croire quelque chose pour des raisons qui n’ont rien à voir avec les preuves. Pareillement, ils cessent parfois de croire quelque chose parce que cela ne les arrange plus de croire ou parce que leurs émotions s’attaquent à leurs convictions.

Considérez les exemples fournis par un ancien athée devenu croyant. Il dit :

« Je croyais en fait que l’esprit humain était entièrement régi par la raison. Or, il n’en est rien. Par exemple, ma raison est parfaitement convaincue par l’évidence que l’anesthésie n’est pas insupportable et qu’un chirurgien expérimenté ne commence pas l’opération tant que le patient n’a pas sombré dans l’inconscience. Mais cela ne change rien au fait qu’une fois allongé sur la table d’opération… une panique enfantine me saisit. Je pense que je vais étouffer et j’ai peur qu’on commence à me charcuter avant que je ne sois complètement endormi. En d’autres termes, je perds la foi dans l’anesthésique. Ce n’est pas la raison qui chasse ma foi ; au contraire, ma foi se fonde sur la raison. C’est le fait de mon imagination et de mon émotion. La bataille se livre entre la foi et la raison d’un côté, l’émotion et l’imagination de l’autre…

« Supposons que la raison d’un homme le pousse à accepter l’évidence du christianisme comme irréfutable. Que lui arrivera-t-il par la suite ? Il reçoit de mauvaises nouvelles, ou il se trouve dans des problèmes graves, ou il vit avec des gens qui se moquent de sa nouvelle croyance. De telles situations font que ses émotions reprennent le dessus et risquent d’écraser sa foi comme sous un bombardement. Ou bien il arrivera qu’il convoite une femme, ou il veut mentir, ou l’orgueil l’envahit ou il voit l’occasion de faire un peu d’argent par un procédé malhonnête. En d’autres termes, il se trouve dans une situation où il lui serait plus commode si le christianisme n’était pas vrai. Une fois encore les souhaits et les désirs de cet homme balayent tout. Je n’évoque pas les heures où des raisons nouvelles et valables contre le christianisme apparaissent. Ces moments-là, il faut les affronter, mais c’est alors une autre question. Je parle seulement des instants où une simple saute d’humeur prend le contre-pied de notre croyance.

« Or la foi, dans le sens que j’utilise ici, est l’art de s’accrocher aux certitudes que votre raison a acceptées une fois pour toutes, en dépit des variations d’humeur. Car votre humeur changera, quel que soit le point de vue qu’adopte votre raison. Je le sais par expérience. Maintenant que je suis chrétien, je subis des sautes d’humeur au cours desquelles toute croyance religieuse paraît fort improbable ; mais quand j’étais athée j’avais de même des dispositions d’esprit où le christianisme me semblait fort probable. » (C. S. Lewis, Les fondements du Christianisme)

M. Lewis conclut avec cette observation qui ne doit surprendre personne :

« Il faut s’assurer que, si vous acceptez le christianisme, ses principales doctrines doivent occuper délibérément votre esprit un certain temps chaque jour. C’est pourquoi la prière quotidienne, la lecture de la Bible et l’assiduité aux cultes font partie intégrante de la vie chrétienne. Nous avons besoin de rappels continuels de ce que nous croyons. Cette croyance, pas plus qu’une autre, ne restera automatiquement vivante en notre esprit. Il convient de la nourrir. »

Conclusion

Quand j’étais adolescent, un adulte s’est adressé à nous les jeunes dans l’Église. Il nous a dit très simplement que dans vingt ans, certains d’entre nous ne seraient plus dans l’Église. Il a précisé que ce ne serait pas parce que nous aurions examiné la Bible de nouveau et que nos études nous auraient amenés à changer de position. « Non, dit-il, ce sera parce que vous aurez commencé à mener un style de vie qui ne s’accordera pas avec la Parole de Dieu. À cause des péchés et des valeurs que vous ne serez pas prêts à abandonner, certains d’entre vous abandonneront la foi. » C’était une autre manière de nous dire que la foi est une décision. Elle se base sur des preuves rationnelles, mais elle dépend aussi de notre volonté.

Puisqu’il en est ainsi, vous avez intérêt à veiller sur votre vie et à ne pas vous mettre à agir de manière contraire à vos convictions. Ne créez pas de conflit entre votre comportement et ce que vous avez accepté comme vérité. Ensuite, prenez le temps chaque jour de nourrir votre foi, de vous rappeler les arguments solides qui amènent une personne à accepter de suivre Jésus. Lisez sa Parole. Lisez d’autres écrits qui appuient la Parole de Dieu et la confirment. Fréquentez d’autres personnes de foi sincère dont la conversation vous rend plus fort.

Sans la foi, on ne peut pas plaire à Dieu. Choisissez donc de fortifier et de s’accrocher à votre foi dans les deux sens que nous avons vus : la conviction que Dieu est là et que sa Parole est vraie, et la confiance qui s’exprime dans l’obéissance et dans la sérénité, quelle que soit l’épreuve que vous traversez.

B. B.
(Dans Vol. 11, No. 6)